daudelin

 
INTRODUCTION AUX EXPOSITIONS INDIVIDUELLES
Les expositions individuelles de Daudelin ne furent pas très nombreuses, ce qui s’expliquent par deux raisons principales.








Expositions solos de Daudelin 
Expositions du peintre 
Expositions du sculpteur, de l’artiste 

Expositions solos de Daudelin

Charles Daudelin en 1965-1966 travaillant dans son atelier à la réalisation de Poulia, une sculpture-fontaine située devant l’édifice du gouvernement provincial de l’Île-du-Prince-Édouard à Charlottetown
Photographe inconnu
La première tient sans doute du fait que, dès les années 1960, l’artiste travaille de plus en plus à des projets d’art public auxquels il consacre beaucoup de temps. Il lui en reste donc très peu pour le travail d’atelier. Il y aura des des périodes, voire des années, au cours desquelles les commandes se succéderont à un tel rythme qu?elles l’absorberont totalement. Il découvre d’ailleurs très vite que cette manière de travailler lui convient parfaitement. En outre, cela correspond au plus haut point à son besoin de se sentir utile.
 
La seconde raison est également fort simple : Charles Daudelin ne désirera jamais être représenté par une galerie. Question de liberté ?
 
Ppourquoi ce dernier choix ?
 
Toute sa vie durant, Daudelin se tiendra éloigné de ce qui peut ressembler de près ou de loin à un carcan. Il aime, dans les projets d’art public, qu’ils s’inscrivent dans le cadre de la Politique d’intégration des arts à l’architecture et à l’environnement des bâtiments et des sites gouvernementaux et publics ou qu’il s’agisse de commandes, il aime, disions-nous, les contraintes qui y sont rattachées, car elles représentent un stimulant créateur. Par contre, il se retrouve vite à l’étroit à l’intérieur de limites qui pourraient lui dicter une ligne de conduite à suivre, ou dans un mouvement qui impose ses vues. Cette crainte, qui le fait se tenir à l’écart des courants, des chapelles et des institutions, l’incite également à refuser les étiquettes. Ainsi n’accepta-t-il jamais que son travail soit qualifié de surréaliste, alors que certaines de ses toiles reflètent une influence indiscutable de ce mouvement. À ses yeux, sa démarche ne s’apparente pas à celle des surréalistes qu’il a fréquentés par des lectures ou dans le cadre d’expositions.
 
Charles et Louise avant leur mariage en 1945-1946, probablement devant la maison familiale de Louise
Photographe inconnu
Ce que nous pourrions qualifier de méfiance à l’égard des galeries remonte à bien longtemps. Avant de prendre le bateau pour Paris, en 1946, il confie à Réginald Boisvert qui, comme lui, fréquente les Compagnons de Saint-Laurent et loge chez eux : « Certains marchands de tableaux, de vraies pieuvres, tiennent [les artistes] par des contrats écrasants, accaparent toute leur production, font une publicité monstre en se servant de leur nom pour passer les produits inférieurs. Ils ont énormément d’influence sur le public. Ce qui ne suit pas la vogue de l’heure est méconnu. Alors, comme je tiens avant tout à rester moi-même, pour produire de mon meilleur*… »
 
Avec les années, ses jugements se feront moins sévères, et, sans doute, sa prudence sera moins grande. N’en demeure pas moins qu’en 1981 il s’explique : « Il y a deux sortes de peintres, il y a deux sortes d’artistes, en fait : il y a ceux qui fonctionnent, qui œuvrent dans les galeries, et il y a les autres qui sont peut-être plus disponibles. Je me sens plus disponible, en fait. Ceux qui travaillent avec les galeries ont une production très suivie. D’une exposition à l’autre, tu les reconnais, tandis que moi, je suis toujours conditionné soit par un budget, soit par des dates limites, soit par l’environnement**. »
 
Peut-être qu’en faisant partie des artistes d’une galerie il aurait eu l’impression de perdre une part de liberté, mais peut-être aussi aurait-il ressenti l’obligation de correspondre à l’image que l’on se fait de l’« artiste ». Ce qu’il évitait justement de faire, préférant de tout temps se voir comme un artisan. Une manière plus modeste de se percevoir et plus conforme à l’homme qu’il était.
 
Être un artiste, puisqu’il faut bien employer le terme, ne correspondait en aucune manière chez lui à un statut. C’était un mode de vie qu’il choisissait, une manière pour lui d’appréhender le monde et d’occuper une place dans la société. Il n’employait d’ailleurs que rarement les termes de créateur et d’œuvre, leur préférant ceux d’artisan et de travail. Un second extrait de l’interview accordée à Gilles Hénault, toujours dans le cadre de l’émission L’Atelier, est révélateur :
 
« C’est peut-être un peu enfantin, mais faire une exposition, tout ça, ça me touche moins. Et je me sens ridicule dans un vernissage. Je me sens un peu cabotin. Je dis : " Bonjour, merci, je suis bien content que vous soyez venu et ta, ta, ta ", tandis que là, je pose mon truc. Il est là. Je le vois de temps en temps. Je sais qu’il y en a d’autres qui viennent le voir. J’aime mieux ça, et puis j’ai l’impression que je fais moins des affaires. Autrement, tu as un contrat avec une galerie où l’on t’offre un pourcentage. »
Charles Daudelin accompagné de sa femme, Louise, lors de la remise du prix Philippe-Hébert de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal en 1981
Photographe inconnu
 
Nous pouvons ajouter que, s’il a l’impression de faire moins des affaires, il a surtout le sentiment qu’en travaillant à des projets d’art public, il est utile à la société.
 
Il n’empêche que, à diverses époques de sa vie, il a ressenti le besoin et le désir d’exposer ses œuvres, d’aller à la rencontre du public et de montrer son travail récent. Deux exemples illustrent bien cet état d’esprit et cette volonté de contrôler, en partie du moins, sa destinée.
 
Le premier se situe en 1963. Charles Daudelin vient d’emménager dans un atelier nouvellement construit sur son terrain mais indépendant de la maison. Dans cet espace, qui sera dorénavant son territoire, il organise une exposition de gouaches et de sculptures à laquelle il convie amis et connaissances. Durant une fin de semaine, il recevra chez lui quelques centaines de personnes autour d’un verre de rosé. Le succès sera instantané : après deux jours, la quasi-totalité des gouaches seront vendues. Une façon bien agréable d’inaugurer un lieu de travail que de commencer par une fête.
 
Le second événement a lieu 35 ans plus tard, à la galerie Simon Blais. Cela faisait quelque temps que Daudelin rêvait d’une grande exposition dans une galerie montréalaise. Il savait ce qu’il voulait, et un seul lieu retenait son attention. C’est donc lui qui prit les devants et alla à la rencontre du galeriste. Il fut sans doute convaincant, car le projet allait bientôt voir le jour avec une ampleur qu’il n’avait pas imaginée.
 
Il n’en sera pas toujours ainsi. Il arrivera bien souvent que l’artiste espère des choses qui ne se produiront pas, alors qu’en d’autres occasions, habité d’une confiance tranquille, il se chargera, comme nous venons de le voir, de les provoquer. 
 
 
  * BOISVERT, Réginald. « Charles Daudelin, prix d’Europe », Vie étudiante, 1946.
** Extrait d’une interview que Daudelin a accordée à Gilles Hénault dans le cadre de l’émission de radio
    L’Atelier, diffusée à Radio-Canada le 31 mars 1981. 
 
     
 
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